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...retourner sur ses pas, de tourner en rond, de se perdre enfin...

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mercredi 8 avril 2009

L'escalade de Babel

Je suis impressionnée.



Apprendre une langue comme le français est vraiment un sacré défi. Cette orthographe en rupture avec la prononciation des mots, les mille et une exceptions qui codifient la grammaire, cette conjugaison complexe aux mille subtilités désinentielles et temporelles... Une vraie demoiselle maniérée... Mais il me semble que la difficulté est doublée quand les apprenants viennent d'Asie. La distance linguistique et culturelle paraît infranchissable. C'est à se dire que Dieu n'a pas fait semblant de mettre la pagaille entre les hommes... C'est bien simple, pour passer du chinois au français ou inversement, il faut changer de cerveau, renverser la polarité entre les hémisphères gauche et droit. Le français est difficile par son hyperstructuration grammaticale, le chinois est insaisissable par son hyper souplesse grammaticale. Et pourtant, je vais de surprises en surprises et je suis si impressionnée que je dois écrire pour trouver le sommeil. Je sors à peine d'un concours d'éloquence organisé dans mon Université et les étudiants chinois se sont montrés stupéfiants d'humour, de spontanéité et d'excellence véritable, tant du point de vue des idées, de la structure et du vocabulaire. Les plus nombreux à participer étaient... les première année ! Incroyable la qualité du français que certains maîtrisent déjà après seulement quelques mois d'étude ! Ce sont de véritables passionnés ! Et puis, je dois aussi dire que j'ai tout récemment fait la découverte de deux blogs tenus par des Chinoises... Je vous conseille d'y jeter un coup d'œil...





Leur français est si bon que j'ai eu du mal à croire qu'il ne s'agissait pas de leur langue maternelle... Et il n'y a pas que les mots, il y a aussi la pensée. Parce que même traduite dans sa propre langue, une réflexion peut nous rester parfaitement étrangère, incompatible avec nos canaux logiques. Mais quel miracle de constater que la communication est bel et bien totale. Je comprends la langue et le langage que l'autre me tient. Ses sous-entendus et son humour me parviennent du fin fond de son autre monde... En cours, vous me trouverez peut-être bien naïve, mais chaque fois que je sens que mon message a été réellement réceptionné, c'est une surprise et une joie. Avec ces étudiants francophones, il me semble que nous contrecarrons en douceur le châtiment divin consistant à nous disperser. La punition n'est pas annulée pour autant, puisque nous sommes fondamentalement tenus à distance l'un de l'autre par des systèmes de conception et d'expression différents, apparemment sans point de contact, mais cet obstacle est dépassé, transformé en enrichissement mutuel grâce à l'effort de nous comprendre, de tendre et d'épouser l'autre monde. A plusieurs, unis dans cet effort, nous pouvons escalader Babel, sans fâcher le Ciel.



5 commentaires:

  1. Je confirme que les écrits de Neige et de Delphine sont de la bonne et passionnante littérature française.

    :-)

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  2. Ah JB...merci.
    Merci, mademoiselle O, je suis si heureuse de lire ce billet. C'est vrai que grammaticalement, le français et le chinois sont très différents, mais nous, Chinois ou Français, nous partageons les mêmes expériences humaines!

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  3. Merci, c'est sympa:) et j'aime bien la photo de la tour. J'ai écrit sur Babel aussi, et je tiens à l'idée de la diversité.
    en espérant de te rencontrer un jour à pékin.

    http://salutdelphine.blogspot.com/2007/07/babel-et-linterculturalit.html

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  4. En tant enseignante ( si j'ai bien compris, je découvre aujourd'hui votre blog), comment pouvez-vous expliquer ce niveau aussi élevé de nos amis chinois?

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  5. Silouane,

    voilà une question que j'avais envie d'aborder. Il semblerait que le secret ne réside pas dans les méthodes pédagogiques chinoises... qui n'encouragent généralement pas les élèves à prendre la parole en classe. Mais j'ai remarqué quelques attitudes chez les étudiants qui peuvent donner un début d'explication :

    - Leur capacité de travail. Enfoncerais-je des portes ouvertes en confirmant que les Chinois sont des bosseurs ? J'ai bien envie de poster une vidéo de Shan Sa qui explique avoir réécrit 22 fois son livre (en français)... L'apprentissage a encore partie liée au gong fu.


    - Leur réelle volonté de s'adapter, de comprendre l'autre culture. Bien sûr, il y a beaucoup de clichés dans leur représentation de la France, mais j'ai été impressionnée par le fait que tous les étudiants sont enregistrés sous un nom français et se font appelés de la sorte en classe ! Tous les Chinois en contact avec l'étranger se dote d'un nom occidental, qui a une réelle utilité ! Je trouve que cela indique une belle ouverture vers l'autre culture.


    - Leur sens de la compétition. Il y a constamment des concours organisés soit par l'Ambassade de France soit par les Universités chinoises elles-mêmes. Je ressors aujourd'hui même d'un concours de la chansons française... Sous l'aspect ludique, vous imaginez facilement la somme de travail que cela représente de pouvoir chanter une chanson dans une autre langue que la sienne ! Dans une semaine, je me rends à un concours d'éloquence qui se tiendra à Beiwai. Les étudiants participent spontanément à ce genre d'activités, sans avoir honte d'échouer ou de réussir !


    - Et puis, une dernière chose : leur soif d'apprendre. Mais ça, je le remarque même dans la rue. Dès que je croise le regard d'un parent, celui-ci encouragera son enfant - parfois très jeune ! - à saluer la laowai "hellooooooo"...


    Mais très honnêtement, je n'ai pas fini de sonder le miracle...

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